Ce qui me fait me lever le matin, ce qui m’empêche de dormir la nuit.
Guillaume Meurice est humoriste. Cette affirmation ne pouvait souffrir de contestation. Jusqu’à peu. On le connaît, ses séquences sont les plus suivies sur France Inter. Il interroge sur des sujets d’actualité des gens, dans la rue. Les propos qu’il recueille interpellent toujours, on croit qu’ils sont toujours ceux d’illuminés, et ça fait le charme et la drôlerie. Le génie des autres chez Meurice, puisque Je est un autre.
C’est à un autre illuminé que Guillaume Meurice s’attache ici. Un vrai, le plus grand. Celui pour qui le poète doit se faire voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens. Vous avez reconnu Arthur Rimbaud. Rimbaud, en la personne de son poème superstar Voyelles.
A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes :
A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,
Golfes d’ombre ; E, candeurs des vapeurs et des tentes,
Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d’ombelles ;
I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles
Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;
U, cycles, vibrement divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d’animaux, paix des rides
Que l’alchimie imprime aux grands fronts studieux ;
O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,
Silences traversés des Mondes et des Anges :
– O l’Oméga, rayon violet de Ses Yeux !
Arthur Rimbaud, 1871
Cosme, c’est le titre du livre et le nom du protagoniste principal. Cosme est un a priori rien du tout d’une seconde moitié de 20ème siècle, fils d’immigrés espagnols, élève pas brillant, sportif certain, lecteur occasionnel, joueur d’échecs exceptionnel. En fait Cosme aime la compétition, enfin il aime le chemin abrupt, l’apprentissage long, le nœud long et qu’a priori on ne peut pas démêler.
Dans ses errances, tantôt va-nu-pieds de Vitry, tantôt trafiquant, tantôt transcripteur dans l’armée, tantôt rien du tout, il devient surtout entre quelques parties d’échecs, lecteur.
Le roman commence avec Cosme qui trouve la clé du poème, il se termine avec les explications. Entre temps : le cheminement, ce qui constitue un être capable de déchiffrer le poème au nez et à la barbe de tous les plus grands spécialistes qui s’échinent depuis toujours sur le poème.
Ce livre est une histoire de marginalité, de chemins de traverse et de chemins intérieurs, et bien plus encore.
Arthur – Voix là la pluie