Génération Instagram. Toute la génération d’adultes et de photographes émergents que nous sommes. La génération qui sait tout faire de ses mains, sans être en permanence sur son téléphone. La génération 1.0 de beaucoup de choses.
Cher Instagram, Moi c’est Maëlys et j’ai 21 ans. Je suis arrivée chez toi il y a quelques temps déjà, c’était en 2013. Je suis venue pour faire comme ma meilleure copine, Loren. Et aussi pour suivre les chanteurs du groupe Italien Il Volo.
A cette époque il n’y avait pas grand monde. On était vite amis dessus. Quand tu atteignais les 1000 abonnés, tu étais une star. Ce qui nous faisait vibrer, c’était les petits blogueurs du dimanche ! Moi j’ai très vite posté mes photos. J’étais déjà très passionnée, et avec Loren on faisait énormément de shooting photo.
On avait un certain œil esthétique. Je crois qu’on était toutes les deux très centrées déjà sur les arts. Du coup on gagnait des abonnés. On avait pas 1000 abonnés mais je voyais déjà ma communauté se former. Je crois qu’ils m’aimaient bien les gens à ce moment.
Puis telle une vrai adolescente, mes émotions ont guidé ma créativité. J’ai fait des photos plus engagées. La mutilation, l’amour, le suicide, le sexe. C’est là que j’ai commencé à « percer ». Car on utilise bien ce vocabulaire maintenant ! Les gens qui étaient déjà influents partageaient mon compte, et je commençais à devenir « influente » à mon tour.
Mais Instagram tu évolues trop vite. Ce petit réseau est devenu grand. Chaque année, le nombre d’inscrits grimpait. Pendant 2 années entière, il y a eu une période « SFS ». Ça voulait dire qu’on faisait des pubs pour tout et n’importe qui. C’est vite devenu une mode et la chasse aux abonnés. J’avoue, j’ai dû le faire au début. Mais ça ne servait à rien. Alors je me suis enfermée dans mes photos, avec ma petite communauté. On se racontaient nos problèmes. J’aimais bien avoir tous ces retours sous mes photos. Cela me permettait de partager ma passion. Je crois que je suis arrivée chez toi au bon moment.
Mon cher petit Instagram, tu as trop vite changé. La course aux commentaires et aux likes s’est trop prononcée. Heureusement que comme certains, j’ai « percé » avant que cette mode soit en place. Je sais que j’ai « percé » pour mon contenu, et non pas pour mon ego. Les années sont passées, et je me suis faite des amis passionnés de photo ici. C’était plutôt chouette. J’ai commencé à faire de la photo en dehors de ma chambre. Un autre monde s’ouvrait à moi. Et tous les ans, mes rencontres photos s’agrandissaient.
Bon je me suis rendue compte que ce n’était pas un très beau milieu. Mais peut-on vraiment en vouloir a des pseudos photographes lorsqu’on voit qu’ils sont obnubilés par la politique des likes et de la course pour un chiffre ? T’es un peu responsable au final mon petit Instagram !
Depuis que tu as été racheté par Facebook, tout laisse à penser qu’il n’y a que ça d’important. Être « connu ». Alors le nombre de photographes s’agrandit. Mais c’est pas que des bons ! Ils sont là juste pour suivre l’effet de mode. Je crois que la réelle condition du métier à été détruite en partie par ta faute. Mais bon, pour ma part je suis devenue professionnelle, après avoir reçu tous ces beaux messages, et tout ce soutien de ma communauté fidèle et sincère. Tu m’as permis de leur transmettre mes douleurs et mes messages. Et pour ça j’arrive presque à te pardonner !
Sans toi je n’aurais pas rencontré les 3/4 de mes meilleurs amis. Je n’aurais pas autant pratiqué la photo. Je n’aurais pas eu autant de visibilité. Je n’aurais pas de clients. Ni d’aussi beaux projets. Grâce à toi, je suis photographe.
Mais je n’oublie pas tes travers, ne va pas le croire. Toi qui censure mon art et ma passion. Toi qui me demande de te payer pour ma visibilité. Toi qui me fait croiser la route d’horribles personnes malintentionnées. Et oui, j’ai été là au bon moment. J’ai su attraper ma chance, j’ai su grandir, t’apprivoiser, en tirer le meilleur. Et je pense qu’un jour, tu ne me seras plus d’aucune aide. Il y a trop de monde, trop d’informations, trop d’images, trop de n’importe quoi et de n’importe qui. Ça te mène à ta perte. Les gens deviennent fous par ta faute. Les gens deviennent riches, deviennent pauvres. Puis comme Facebook, tu ne nous seras plus d’aucune aide pour nous les photographes. Tu ne nous auras plus dans tes filets. Et je pense que c’est tant mieux !
Ton utilisatrice fidèle mais fatiguée.
Maëlys, devenue Ivannalys sur ton réseau.