C’était son moment préféré. S’allonger là, après la pluie, la foule et le bruit. Juste frôler le parquet, sentir l’odeur âpre d’un bois taillé il y a trop longtemps et compter ses rainures, et se perdre dans ses mémoires. Elle apercevait les ombres qui l’on frisé avant elle, dansantes, souriantes, aimantes. Elle devenait ombre elle même, parmi elles, avec elles, son corps se confondait aux courbes sombres des murs.
N’être plus rien, pour personne, par personne, voilà ce qu’elle cherchait. Elle s’était levé ce matin avec déjà la sensation d’appartenir à quelqu’un d’autre qu’elle même. Elle avait regardé avec chagrin la masse ténébreuse allongée à ses cotés, impossible de l’aimer. Plus tard dans la journée, elle s’était sentie bien seule au milieu de la multitude de silhouettes grises. Le brouillard n’avait rien arrangé. Elle avait besoin de comprendre, face à elle même.
Elle contemplait son reflet, beau mais bien sombre. Elle aimerait le serrer dans ses bras, lui dire qu’elle était là pour lui. Au lieu de ça elle continua de le regarder, lentement, doucement. Chaque fois elle apprenait à l’aimer, un peu plus. Mais chaque fois elle fermait les yeux et les ombres disparaissaient, et le reflet s’assombrissait, à nouveau.
Mélina Rard – Photo de la semaine