La file d’attente – Métro Polis, saison 2

Couverture : Apostrophe M


Suite à l’exposition Métro Polis réalisée en mars dernier, Pauline Gauer et Marvin Gomis signent ensemble pour une nouvelle saison. Cette fois-ci, tout débute par un arrêt mondial de la vie courante. Et Métro Polis sans métro, c’est difficile à imaginer. Alors, Métro Polis se réinvente pour un temps, par des mots et des images sous le signe de la vie pendant le coronavirus, dans la rue ou devant les supermarchés. Soyons forts.


Évidemment, plus de métro, plus de trajet, plus de vie à attendre sur les quais. Plus de rencontres et plus de nostalgie.

Les gens restent chez eux et marchent une fois par semaine. Du moins, c’est ce que je m’efforce de croire. Un mètre de distance entre ces petites silhouettes aux pieds parallèles qui font la queue devant les magasins. Derrière moi, un homme qui attend. Il fait si petit au milieu du monde.

Dans ses mains, une liste de courses qu’il complète de choses incroyables je pense : de la farine, même s’il n’y en aura plus, des pâtes, des bananes et des yaourts aux fruits. Survie, survie, survie. Ses mains semblent trop légères pour son stylo.

Je me demande s’il pensait qu’une telle situation arriverait un jour, ou si comme tout le monde, pour lui c’est dans les films.

Un manteau noir alors qu’il fait 24 degrés. Une casquette délavée. Pas de sacs. Comment va-t-il porter toute cette liste, de ses bras fragilisés par le temps ? J’aimerais me retourner et lui demander comment il va, s’il est seul, s’il s’occupe. Depuis mars, il y a un peu plus de compassion dans le regard des gens. Le sentiment de vivre quelque chose de grave, ensemble. Chacun essaie de soutenir l’autre.

Il se met à pleuvoir de fines gouttes, qui résonnent sur le auvent de métal au dessus de nous. C’est bientôt mon tour d’entrer dans le magasin, je me demande bien ce que je trouverai aujourd’hui.

Nos chemins s’éloignent, avec l’homme au manteau noir. Il est temps de rentrer. Je croise des enfants qui jouent sans masques, et des parents qui prennent l’apéro dans la rue. J’ai du mal à comprendre certains d’entre nous parfois. Mais j’imagine que ça ira. Je ne sais pas quand, mais ça ira.


Pauline Gauer et Marvin Gomis

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