Couverture : Près du Bataclan, à Paris le soir du 13 novembre 2015. (Frédéric Stucin/pour Libération)
L’horreur de l’instant
Le soir des attentats du 13 novembre 2015, Frédéric Stucin, photographe, travaillait pour Libération. Il raconte : “Cette image a été réalisée lors des attentats du Bataclan et des terrasses parisiennes, très tard, après l’assaut de la BRI. À cette heure-ci, on espère que les terroristes ont été stoppés, au moins au Bataclan. Mais on ne sait pas grand-chose d’autre.”
A cet instant, c’est le cauchemar et la perte de sens qui prennent le dessus. “C’est une nuit totalement chaotique et floue.” confie le photographe, “Avant ou après cette photo, je ne sais plus, j’ai vu sortir la maire de Paris Anne Hidalgo, de la salle de spectacle. J’ai compris à son regard toute l’atrocité de ce qu’elle avait vu.”
Dernières minutes de l’ancienne vie
Le flou partout, et pourtant des instants d’humanité se créent dans cette scène chaotique. Frédéric photographie l’amour après l’horreur, il témoigne : “Cette image représente pour moi un espoir, mince et abîmé certes, mais un espoir tout de même. Deux personnes ont survécu et se retrouvent. Elle m’a fait espérer que le monde ne s’était pas totalement écroulé, de repousser l’horreur de cette soirée, de la supporter.”
Cette photographie de Frédéric Stucin illustre un article de Chloé Pilorget-Rezzouk et Julie Brafman publié le 13 octobre 2021 : “Récits du Bataclan : le procès du 13 Novembre, kaléidoscope d’une douleur projetée à l’infini”.
PHOTOGRAPHE Depuis deux décennies
Frédéric Stucin est dans le métier depuis presque 20 ans. Aujourd’hui en résidence au sein du service psychiatrique de l’hôpital de Niort, il mène un projet en collaboration avec la DRAC de Nouvelle-Aquitaine et la Villa Pérochon.
“J’ai été marqué récemment par la réflexion d’une patiente, peintre amateur, à qui l’on demandait de décrire la manière dont elle peignait. Je procède, a-t-elle répondu, «d’après nature ou d’imagination, mais le plus souvent des deux en même temps». L’expression m’est restée. J’ai l’impression, moi aussi, de photographier d’après le réel et l’imaginaire en même temps : le mien, celui des personnes photographiées, références et inspirations, dans un dialogue où chacun nourrit l’autre.”
Cette manière de créer, Frédéric l’applique dans ses travaux personnels, comme La Source, un livre publié aux éditions Maison CF. L’ouvrage est le résultat d’une exploration de la Seine, “de Paris jusqu’à sa source, entre réel et imaginaire”. Il sera disponible à partir du 11 novembre 2021, pour la Foire Internationale Paris-Photo.
Pauline Gauer