Selah Sue – Bedroom (2020)

Hors du temps. Après cinq années passées en retrait de la scène musicale dues à la naissance de ses deux enfants, Selah Sue revient avec un nouvel EP nommé “Bedroom”, tout en douceur. En effet, ce retour discret révèle une certaine forme de sérénité retrouvée, qui vous poursuivra tout au long de l’écoute de ce projet. Les cinq titres présents forment un ensemble voluptueux, semblables aux cinq doigts de la main la plus aimante qui soit.

Toutes les chansons de cet EP ont été principalement composées à la guitare, elle-même accompagnée d’effets sonores venant ajouter une forme de paix à cette ambiance envoûtante. Si vous êtes de ceux qui aiment se réveiller au son du chant des oiseaux, alors le titre d’ouverture “In a heartbeat” saura vous tirer du lit sans même que vous n’ayez eu à ouvrir les yeux. Immédiatement après, laissez-vous porter par le morceau “You”, où la chanteuse belge se livre sur sa nouvelle vie de maman, et dont le clip, déjà en ligne, met en scène son quotidien avec ses enfants.

Au final, une guitare omniprésente, une voix infiniment douce, des textes remplis d’amour, et voilà de quoi s’installer très confortablement dans la “Bedroom” de Selah Sue.

 

Klub des Loosers – La fin de l’espèce (2012)

Changement de décor, rangez les coeurs, sortez les couteaux, et rangez-les dans les coeurs. Sorti en 2012, “La fin de l’espèce” n’a rien à voir avec une quelconque prédiction maya, mais décrit une civilisation bien actuelle, et bien mal en point. Produit par DJ Detect et interprété par le rappeur Fuzati, cet album ferait presque figure d’exception dans le paysage rapologique français, pas sur son fond mais bien plus sur sa forme. Pour cause, des thèmes tels que la mort, le monde professionnel, la routine, les relations (in)humaines sont monnaie courante dans beaucoup de styles musicaux, quelle que soit l’époque. Et pourtant, complétés par des instrus entêtantes voire hypnotisantes, les textes sont crus, incendiaires, et récités avec un cynisme et une froideur inégalables.

Si vous connaissiez le pessimisme de Lemony Snicket, alors vous découvrirez ici une forme de catastrophisme inébranlable. Une mort ratée, ou une seconde naissance, dès le titre “Vieille branche” vous plongera dans l’univers lugubre du Klub des Loosers. Directement suivi par “L’indien”, qui vous contera la morosité de la vie de bureau. Dans cet album, vous apprendrez à relativiser la joie d’une naissance en écoutant le morceau-titre “La fin de l’espèce”, et à vous réjouir de la difficulté des rapports humains au quotidien avec “Destin d’hymen”.

En somme, un projet impitoyable, presque cruel, où joie et bonheur en prennent pour leurs grades. Et si les trois premiers mots de cet album sont “je suis vivant”, alors sachez que vous venez d’écouter la partie la plus joviale de “La fin de l’espèce”.


Valentin Regazzoni / double album