La Misericordia d’Emma Dante est à la Manufacture

C’est une véritable chance d’accueillir un spectacle d’Emma Dante à Nancy, à la Manufacture. La comédienne, autrice et metteuse en scène italienne présente Misericordia, une pièce sur l’amour maternel, la marginalité et comme toujours avec elle, sur la beauté de tous les corps.

Le corps, quel instrument splendide. Dans chaque création d’Emma Dante, le corps est au cœur, c’est lui qui pousse à jouer, c’est lui qui traduit, c’est lui qui fait le texte, c’est lui qui emporte la salle et qui crève la scène. Ici encore, le corps occupe une place Dantesque. La pièce à beau être en italien, on y comprendrait tous les enjeux juste en regardant les corps nous parler.

Emma Dante ne créé pas tout d’avance. Elle réunit des comédien·nes avec seulement un thème en tête, quelques directions, puis les improvisations, la recherche de personnages et le jeu créent les situations, le texte et le sous-texte. Pour ce projet, elle souhaitait parler de la maternité, celle qui est non-biologique. De la marginalité qui mène à la misère. De la maladie qui crée des cases entre les personnes dites normales et les personnes dites déficientes.

Cela mène à l’histoire de 3 femmes, vivant dans le même appartement délabré. Elles élèvent un enfant, hyperactif, né prématuré, qui parle avec son corps plutôt qu’avec des mots. Enfant dont elles s’occupent avec tout l’amour qu’elles peuvent après la mort de sa mère, leur ancienne colocataire. Mais arrive le jour où une décision doit être prise à propos de la vie de cet enfant, qui a déjà trop grandi dans un environnement de survie.

La pièce évoque des thèmes qui nous touchent forcément : la violence faite aux femmes, l’éducation d’un enfant dit spécial, la pauvreté, l’amour « familial ». La force d’Emma Dante, c’est d’emmener ces thèmes avec une digne justesse. Ces femmes et cet enfant souffrent d’une vie de misère mais vivent avant tout, car la misère ne laisse pas le temps de plonger dans le désespoir. La joie l’emporte sur la maladie de l’enfant, l’amour l’emporte sur les disputes, la famille l’emporte sur le reste du monde. Misericordia, la misère et le cœur.

Suivre un spectacle surtitré, d’habitude, c’est chiant. Pas quand c’est pour voir du Emma Dante. Vous saurez parler italien à la fin du spectacle. L’action sur le plateau est tellement intense que l’on se force à détacher les yeux du texte qui le surplombe.

Le spectacle est rempli de virtuosité. Dès les « battements de cœur » du début, on est emporté dans univers scénique qui tient du génie. Chaque scène scotche sur son siège. Et l’on a pas le temps de se reposer dans le dossier. Moments de danse, moments en chœur, moments de rire, moments de clown, moments de tristesse, Misericordia est une montagne russe faite d’Italie. C’est la pluridisciplinarité dans son état de grâce.

On dit que le théâtre a réussi lorsque l’on voit la vie sur scène, c’est le cas. Même le renversement d’une poubelle par terre nous bluffe. Emma Dante a travaillé 2 ans avec cette troupe et ça se sent. Rien n’est en trop, tout est à sa place, tout est maîtrisé comme un fil de dentelle. De la virtuosité, on a dit.

Annulez vos soirées. Ce vendredi et ce samedi, il faut aller voir Misericordia, il faut aller voir le travail d’Emma Dante, il faut aller voir la performance des 4 personnes sur scène. On a presque envie de vous obliger.

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Avec Italia Carroccio, Manuela Lo Sicco, Leonarda Saffi, Simone Zambelli
Texte et mise en scène Emma Dante
Compagnie Sud Costa Occidentale (Sicile)
Traduction du texte en français Juliane Regler
Surtitres Franco Vena
Lumière Cristian Zucaro
Durée : 1h
À partir de 16 ans

Au Théâtre de la Manufacture le :
Vendredi 10 mars à 20h
Samedi 11 mars à 19h

Tarifs : Plein : 22€ / Groupe (8 personnes) : 17€ / Réduit (-28 ans) : 8€ / Mini (étudiant.es): 5€

Réservez vos places ici.

Plus d’informations sur le spectacle ici.

Photos de Masiar Pasquali.

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Josh