Chers lecteurs de Première Pluie,

Je m’appelle Lola, j’ai 21 ans. J’aime faire du vélo, les promenades entre les sapins vosgiens, faire des gaufres le dimanche, lire et relire Orgueils et Préjugés et beaucoup papoter.

Une carte postale pour vous raconter à vous, curieux et aventuriers de la première heure, mon séjour en Bolivie.

Le chapitre I s’est écrit il y a maintenant un an. Je suis étudiante aux Pays-Bas et comme mes amis je me tourne vers le retour au pays et les candidatures master. Je ne suis convaincue par rien mais déterminée à ne pas me planter. Alors je me dis simplement que ce n’est peut être pas le moment et que mon monde ne va pas s’arrêter si je ne suis pas diplômée Bac +5 à 23 ans. 

Six mois plus tard, le 4 septembre 2019, je posais ma valise à Cochabamba, Bolivie.

Mon séjour se résume en deux mots : Bolivia Digna, cette petite fondation montée il y a 14 ans par une famille locale. Aujourd’hui le projet est devenu un beau bébé. Bolivia Digna c’est 210 enfants des quartiers pauvres de Sacaba qui tous les après-midi de la semaine ont accès à deux centres où les volontaires proposent des activités ludiques, des cours de langues, de sport, de cuisine, des ateliers créatifs… C’est aussi du soutien scolaire pour les enfants de Cochabamba et des visites quotidiennes à l’hôpital pour les enfants malades.

De mon côté, je suis restée sur place pendant 16 semaines. J’ai travaillé en tant qu’animatrice dans le centre Tackoloma avec des enfants de 7 ans à 15 ans et j’ai également pu travailler comme assistante de communication pour l’association.

Mon départ en Bolivie c’était aussi la première fois que je quittais l’Europe. J’ai cru débarquer sur une autre planète. Quelque part où la pollution, les fils électriques et les motards sans casque ont remplacé les vélos et le chant des oiseaux.

Arpenter les villes boliviennes c’est se rendre compte que les voitures ne klaxonnent pas pour prévenir d’un danger mais simplement pour annoncer leur passage au carrefour, se régaler avec des jus d’orange à tomber pour quelques centimes seulement, vous entendre appeler amiga chaque fois que vous passez devant une tienda et apprécier le street art à chaque coin de rue.

Lorsque vous voyagez à travers le pays, comptez sur le trajet pour être aussi mémorable que le reste du séjour, pas toujours de manière positive cependant.

Au cours de mes quatre mois passés là-bas j’ai pu découvrir le parc national de Toro Toro, connu pour recueillir des centaines d’empreintes de dinosaures, le célèbre et magnifique Salar d’Uyuni, les ruines Inca de Sipe Sipe et le tropique de Villa Tunari, aux abords de la forêt amazonienne. J’ai découvert La Paz et son téléphérique urbain qui vous offre une vue à couper le souffle sur cette ville nichée à 3600m d’altitude.

J’ai aussi eu la chance de découvrir Cuzco, au Pérou ainsi que l’incroyable Machu Picchu, la montagne aux sept couleurs et de naviguer sur le lac Titicaca.

Autant d’endroits que je vous recommande 100x fois mais qu’il m’est impossible de détailler tant ce serait long et ennuyeux car ces choses-là se vivent bien plus qu’elles ne se racontent. Ni les mots ni les photos ne rendent justice aux trésors de l’Amérique du Sud. 

La Bolivie, il y a ce fossé entre les villes et les campagnes. Entre les Campesinos et les Citadins. Entre le christianisme et les croyances de la Pachamama. Fin octobre, les élections présidentielles ont lieu. Le président sortant Evo Morales, au pouvoir depuis 14 ans est annoncé gagnant au premier tour. Les gens crient à la fraude. S’ensuivront trois semaines de crise politique, de manifestations, d’affrontements pendant lesquels nous n’avons pas pu nous rendre aux centres et voir les enfants.

Pour info, Morales aura fini par accepter de réorganiser les élections avant de quitter le pays. La Bolivie attend désormais ses nouvelles élections qui doivent se tenir au mois de mai prochain.

Je n’ai aucune envie de me pencher sur l’aspect politique du conflit. Simplement parler d’un combat qui n’a pas été le mien mais pour lequel j’ai cependant été aux premières loges. Ces semaines, marquées par l’angoisse parfois et les bruits des affrontements qui se poursuivaient de 6 heures du matin jusqu’à parfois très tard le soir, auront mis en lumière les dissonances du peuple bolivien. Les Citadins révoltés ou calmes, mais déterminés à obtenir un nouveau gouvernement, les pueblos engagés pour défendre ce président sorti de leurs rangs.

Je me souviendrai de mes voisins, qui reconnaissaient le travail que Morales avait fourni au service de la nation bolivienne mais qui redoutaient de voir leur pays tombé dans le même piège que leurs voisins sud-américains.

Bien avant tout cela, à la veille de mon départ pour Cochabamba, j’ai embrassé ma grand-mère et il n’y avait dans ces yeux aucune inquiétude. Elle m’a embrassée, et m’a dit « là-bas tu vas comprendre la vie ». Très poétique mais très vrai. En ces temps de pandémie mondiale, je m’inquiète pour elle, pour sa santé, je m’inquiète aussi pour les enfants de Sacaba et je me demande comment vont mes amis d’Erasmus.

En écrivant cette carte postale, je n’ai qu’une aspiration, qui n’est pas celle de devenir influence travel, ne vous inquiétez pas, mais plutôt de vanter la solidarité internationale.

Vous dire que depuis que je me sens citoyenne du monde, plus de portes se sont ouvertes. Je n’ai pas non plus laissé mon engagement sur la piste d’atterrissage de l’aéroport CDG le 24 décembre dernier. Première Pluie offre une tribune à ceux qui veulent continuer d’ouvrir des portes et je serai bientôt ravie de vous ouvrir celle de l’association Citoyen des Rues International.

En attendant, merci d’être arrivés jusqu’ici.

Prenez soin de vous, de votre famille et quand le monde s’offrira de nouveau à nous n’oubliez pas la Bolivie.

A bientôt,

Lola


Lola Veillon – Carte Postale