Hyperactif, c’est vrai qu’il pourrait être un commandant de bord, toujours en partance, avec toujours une nouvelle idée. Un an après la sortie de son premier album, Drapeau Blanc, il fallait inventer la suite, qu’il préparait en fait de longue date. La suite, c’est ce projet Dans Ta Ville Ep2, qui rend justice au rap mondial, et qui témoigne que le genre s’impose dans toutes les langues. Il affirme l’avoir fait le coeur léger, en profitant de l’occasion pour tenter des choses. Grande discussion avec Lord Esperanza. 


C’est combien de temps de travail un projet comme Lord Esperanza dans ta ville 2 ? 

En vrai, en tout, deux ans. 

T’es d’accord si je te dis qu’on a l’impression qu’il a été fait pour coller à l’actu, en mode travailler de loin avec des gens du monde entier à un moment où justement on devait un peu rester chez nous ? 

Grave, il tombe à un moment intéressant. On pourrait croire que ça fait peu de temps, mais ça prend un temps fou. Je suis très fier de proposer ce projet, ce concept. Ça fait longtemps que j’avais l’idée en tête. J’avais peur que quelqu’un le fasse avant que je ne termine. Je suis étonné que ça ne se soit jamais fait en fait. 

« Il n’y a plus de frontières. »

Sans doute parce que le concept est cool mais la tâche est titanesque pour réunir autant de sensibilités. D’ailleurs, c’était quel genre de nécessité pour toi, de collaborer avec des artistes du monde entier, c’est venu comment ? 

J’avais envie de montrer qu’on des codes en commun et qu’on partage une culture. Que le rap est devenu international, et que grâce à instagram on peut faire du son tous ensemble. Je trouve ça beau. Il n’y a plus de frontières, au sens propre comme au sens figuré. Ça, ça n’a pas de prix. 

Et puis, j’avais fait le premier, Dans Ta Ville, où le concept était un peu différent : un réal de chaque ville devait faire un clip sur le son. Là c’est des collaborations avec des artistes du monde entier. 

Je pense que je tenais aussi à l’expérience esthétique qu’on a développé autour de ce projet. On a réfléchi avec mon équipe à détourner toutes les oeuvres culturelles qui existaient déjà dans l’univers du voyage, que ce soit Oss 117 où les films avec Di Caprio. Il faut dire aussi que le projet a été pensé pour s’écouter d’une traite, tous les morceaux sont reliés entre eux. C’est pensé comme un voyage. Et même les interludes viennent renforcer cet effet. 

« Je suis devenu très exigeant. »

C’est quoi le plus compliqué à faire sur un projet comme ça ? 

Déjà, c’est de trouver une homogénéité. C’est pour ça que la plupart du temps je proposais la prod, avec mon couplet et le refrain. Pour aller trouver de la cohérence, et garder l’esprit de l’histoire qui est racontée. Au début, c’est chill, après il y a les turbulences, donc il y a les bangers, puis tu reviens au chill, comme dans un vrai vol. 

J’avais jamais fait d’album concept en fait. Donc ça a été dur de trouver de la cohérence à tout ça. 

Et puis évidemment, les échanges avec les artistes. Par exemple, pour la Corée du Sud, il a fallu compter 1 mois et demi pour la négociation des contrats. Mais j’en rigole, je suis fier de sortir ce projet maintenant et je crois que ça a prit le temps que devait prendre. Tu vois la version du clip c’est la v23. Pareil pour le mix, c’est la v18. Je suis devenu très exigeant. Donc le temps, c’est un mal pour un bien. Toi c’est quoi ta collab préférée ? 

Aha. Ces dernières années j’écoute pas mal de rap italien, donc je connaissais Coco, je suis hypé par le truc. Mais je prends un vrai plaisir à écouter la collab sud-coréenne avec E.Viewz justement. Et puis les langues germaniques tabassent en rap, tout comme l’arabe, donc il y a une vraie palette sur le projet. Et toi, tu as des préférences ? 

C’est une question de langue, de chanson, de mood, d’artiste. Je crois que j’aime aussi beaucoup le feat avec l’Italie. Puis on reste en français mais j’aime beaucoup le feat avec Scylla pour la Belgique. Et pour compléter ce top 3, je vais dire D.Double pour les Pays-Bas avec Liberté Égalité Fatalité. Je kiffe comme il rappe, il a un vrai charisme. 

Oui ça tabasse justement, là on est dans les turbulences. Je ne sais pas si tu as prévu de faire des traductions, mais je pense qu’il y a des gens qui vont essayer de deviner ce qui est dit juste avec l’interprétation. 

Oui c’est prévu !

C’est cool, tu vas faire une génération de gens polyglottes. 

Ahah, oui, ça c’est cool. Mais sans rire, j’espère que ça va donner de la visibilité à des langues. Et même, il y a des artistes qui sont moins connus dans leurs pays j’espère que ça leur fera du bien. Mais dans l’ensemble, j’ai eu de la chance, j’ai travaillé avec des artistes qui sont un peu au même de leur carrière que moi. J’espère que le projet aura une vraie résonance dans les pays. 

Echange de cultures et de bons procédés. 

C’est de loin le projet le plus excitant, visuellement, artistiquement, que j’ai pu proposer. Comme il y a ce concept, j’ai pu tenter des choses, je l’ai fait avec beaucoup de plaisir et beaucoup moins de pression que mon premier album (Drapeau Blanc, paru l’année dernière, ndlr). Il y a, je crois, plus de laisser-aller, plus de lâcher prise. J’ai réussi à me connecter à une nouvelle forme d’énergie. 

« C’est de loin le projet le plus excitant, visuellement, artistiquement, que j’ai pu proposer. »

T’avais déjà coffré des morceaux pendant aussi longtemps ? 

Ça va peut-être t’étonner, mais oui. Dans Polaroïd, Anna avait deux ans. Dans Internet, il y avait aussi un morceau qui avait un an et demi avant je crois. Mais j’avoue que ces derniers temps moins. Parce que j’évolue aussi musicalement. 

Parce que ton univers évolue plus vite, il faut que les morceaux sortent plus vite pour y ressembler vraiment ?

Oui. Sur ce projet, il y a encore les bases de mon univers, mais il y a aussi des trucs nouveaux, que je n’avais jamais proposé avant. Notamment dans les choix de prods. Donc c’est assez excitant de pouvoir proposer ça, ça l’est moins deux ans après. 

Ça anticipe la question suivante, qui est : Qu’est-ce que tu faisais la première fois sur ce projet, qu’est-ce que tu tentais ? 

Le fait de travailler à distance, ça m’a poussé à plus faire confiance. Après, le concept en lui-même est une première fois pour moi. C’est une nouveauté pour moi de faire un projet composé uniquement de feats. Comme je te disais, ça a été excitant et en même temps ça a été fait avec peu de pression. C’est un projet entre deux albums, sans objectifs de retombés, sans volonté de faire de tubes. Je suis entouré par mon équipe, on a les moyens de le faire, alors on le fait. Sans les contraintes. Comme le projet sort sans ambition réelle, tout ce qui va se passer, ça sera du positif. 

Oui c’est presque un projet surprise, il est annoncé deux semaines avant sa sortie. Bonus aussi dans le sens où comme c’est une première fois, ça restera dans les mémoires. 

Oui. Après, on se dit que c’est ambitieux mais si ça se trouve, les gens ne vont pas adhérer à ce délire avec des voix dans des langues différentes. On ne peut jamais savoir. C’est pour ça qu’il y a aussi un peu de solo et des titres avec des francophones. Cha cha cha avec Arma Jackson par exemple, ou Dernière danse avec Scylla. J’ai choisi aussi ces morceaux-là pour utiliser des codes que j’avais déjà tenté justement. Le piano-voix avec Scylla notamment. Et pour le titre avec Arma Jackson, le titre est un peu salsa, il peut faire penser à Maria donc c’est cohérent. 

Les plus énervés le prendront comme un ep avec quelques nouveaux sons de toi. 

Oui, voilà. Et puis j’ai essayé de contenter tout le monde, avec des sons chills, d’autres plus pops, et des bangers violents. 

Et du coup, il y a un effet carte postale. 

C’est exactement ça. 

« Mon ingé son dit que j’ai des oreilles de cyborg. »

Qu’est-ce que tu as appris sur toi en faisant ce projet ? J’avais envie de dire la patience, mais si tu avais déjà coffré des morceaux pendant longtemps, c’est peut-être plus la confiance dans les autres ? 

Hm. C’est une très belle question. Je pense aussi que je me suis encore plus découvert et affirmé comme arrangeur et réalisateur. Avant je savais déjà bien où j’allais, mais maintenant mon ingé son dit que j’ai des oreilles de cyborg. Dans le sens où j’entends des choses qu’il n’entend plus. Mais quand je fais un morceau maintenant, je sais vraiment ce que je veux à la seconde près. Et ça c’est assez plaisant, parce que quand tu as un truc en tête, et que tu as besoin et envie de le faire sortir, c’est toujours un peu compliqué. Mais de plus en plus à chaque projet, j’arrive à me rapprocher de ce que j’avais en tête. 

Maintenant, je sais ce que je veux à la seconde près. Je me rapproche de plus en plus de ce que j’ai en tête. 

Sur ce projet j’ai beaucoup appris. Je me suis viandé aussi. Sur la patience, clairement. Moi je suis un grand impatient. J’ai toujours fait des morceaux qui sortaient assez vite. Là, le fait de taire le projet, de travailler longtemps les visuels pendant le confinement, ça rend patient oui. 

Il y aussi quelques changements dans l’équipe. Sur la compo, sur ce projet, je n’ai pas bossé exclusivement avec Majeur Mineur. Ça m’a sans doute fait du bien de voir d’autres personnes. 

Vous deux, avec Majeur Mineur, c’est comme dans un couple en fait.

Ah mais c’est ça. On a vécu des moments tellement forts. L’argent, les labels, les rendez-vous, les dates. Notre travail nous a conduit devant des publics de 8000 personnes. Comme il le dit souvent, on a vécu 10 ans en 2 ans. Là, on fait chacun des trucs de notre côté. On garde que le meilleur. En plus, là il y a des prods de lui sur le projet. 

Avec toi, il y a peu de vacances, les projets s’enchaînent, ton premier album est sorti il y a un an, et là récemment, tu as sorti Paramour, ta ligne de vêtements. C’est un besoin pour toi de tout enchaîner ? Qu’est-ce qu’il se passe si tu t’arrêtes ? 

C’est vrai que je suis un peu hyperactif. C’est un besoin dans le sens où je me dis que j’ai beaucoup de chance d’être là où je suis. Je suis hyper reconnaissant de la chance que j’ai de vivre de ma musique, d’avoir une communauté. Ma façon de la remercier, c’est de produire des chansons, de rencontrer des gens, de faire toute sorte de choses. 

C’est pour ça que je fais tout ça, même si là je sais qu’après ce projet, je vais prendre un peu de temps pour vivre. C’est vrai que là ça fait 5 ans que je suis la tête dans le guidon.

J’ai beaucoup de chance d’être là où je suis. Ma façon de remercier, c’est de faire de la musique.  

Et puis ça peut être dangereux artistiquement de ne pas prendre le temps de prendre du recul. 

Oui bien sûr. Même si je continue de jeter beaucoup de morceaux. D’ailleurs, tu vois, sur ce projet, j’ai utilisé des textes que je n’ai pas gardé pour mon deuxième album. Je me disais que ça avait du sens et qu’il fallait quand même que ça vive. 

Et du coup, Paramour, les vêtements, c’était une envie depuis longtemps ? 

Oui, c’était un rêve partagé avec Léo, immense ami et bras droit qui m’aide depuis longtemps sur le merch et le community management. Il y avait cette envie commune de créer une marque à proprement parler. Et moi, j’ai un grand-père qui était tailleur, donc j’ai baigné dans l’univers du vêtement. Léo aussi. On aimait ça, et on voulait faire quelque chose d’éco-responsable, pour respecter nos valeurs. C’est comme ça que ça s’est fait. C’est vrai que c’est le début d’une nouvelle aventure. C’est aussi pour toucher à autre chose et ne pas être que dans la musique. Ça reste un milieu artistique, mais j’ai beaucoup moins de références et de codes. 

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Photo : Jeremy Gentit

Oui et comme tu dis, tu t’impliques de plus en plus même dans les visuels autour de tes projets. C’est aussi une hygiène de s’impliquer plus là dedans maintenant j’imagine. 

Grave. J’aime trop ça depuis le début en plus. J’ai toujours été un peu derrière pour donner mon avis. Mais même les clips maintenant tu vois, c’est de la co-réal. Je suis investi au plan près. Mais bon tu vois, c’est autant kiffant que névrotique tu vois. Parce que je suis hyper intransigeant. Même si c’est toujours avec respect. Temps que j’ai pas ce que je voulais, je vais recommencer ou faire recommencer. Comme je te dis, c’est paradoxal, c’est cool parce que tu sais ce que tu veux et tu peux mettre à profit tes idées, et en même temps, il faut trouver des gens qui savent le comprendre, et qui sont prêts à partager leur vision avec toi. Il faut communiquer. 

Et puis, plus le temps passent et plus les projet se doivent d’être aboutis, tu m’arrêtes si je me trompe, c’est plus compliqué d’être fier d’un truc la deuxième fois que tu le fais de la même façon. Donc c’est légitime.

Oui grave. Avec le temps qui passe, tu prends de l’expérience qui se transforme aussi en exigence beaucoup plus précise et plus détaillée. Dans tous les domaines. Je pense aussi au mix, avec les effets, les backs, les ambiances. Pour ce qui est du visuel, plus le temps passe et plus tu te spécialises dans ce que tu as envie de faire. Et plus tu découvres et assimiles ton univers. 

C’est pour ça aussi que c’est précieux de faire un tour du monde avec plusieurs culture visuelles et musicales, c’est aussi une façon de s’inspirer ? 

J’avoue c’est bien dit, je n’avais pas pensé à ça. Je ne sais pas si je l’ai fait pour m’inspirer, mais c’est sur que même visuellement ça a compté. 

Et puis il y a aussi des approches très différentes en fonction des pays. 

Oui. C’est plus décomplexé. C’est moins premier degré, là où j’avais une armure. Je te l’avais déjà dit à l’époque, ça camouflait un manque de confiance en moi. C’est vrai que là ça m’a permis d’être dans l’humour, le second degré, notamment avec la cover où les interludes. Moins prise de tête. 

Oui, même si c’est normal de se prendre la tête pour un premier album. 

Voilà. Mais il y avait beaucoup de pression. Beaucoup d’argent. C’est con, mais quand tu signes pour des grosses sommes d’argent, c’est de la pression. 

Et puis c’est pas comme si tu étais si vieux que ça. 

Bah oui, c’était nouveau pour moi. Le fait aussi de faire l’album Drapeau Blanc qu’avec Majeur Mineur, ça a eu plein de bons côtés, plein de bonnes ondes pour la cohérence, et il y a un côté très abouti. Mais en même temps tu as l’impression de ne pas pouvoir explorer tous les terrains. Tout comme lui il a fait Itzama pour explorer des choses qu’il ne peut pas explorer avec moi. Donc voilà, là j’ai pu aller vers d’autres directions, vers d’autres inspirations. J’explore de nouveaux territoires. Il y a aussi ce travail avec un nouveau graphiste, avec qui j’avais déjà bossé pour Paramour. J’ai bossé aussi avec les Shawondasee aussi pour le mix pour la première fois, même si je leur avait confié le projet de Sally. Donc c’était clairement un nouveau projet. 

J’explore de nouveaux territoires.

Et toi le voyage, c’est important pour toi ? 

Oui grave, j’adore ça. 

Les artistes que tu as capté pour le projet, il y en a que tu avais déjà rencontré ? 

Oui, il y en a certains que j’ai rencontré pendant des voyages pour des concerts. J’ai eu la chance de faire des voyages à New-York, à Montréal, à Berlin. Donc sur place on restait plus longtemps, on prenait un studio et on faisait du son, ça c’était cool de pouvoir faire sur place, et avec les personnes. 

Elles ressemblent à quoi tes peurs aujourd’hui ? 

J’ai peur de plein de trucs je pense. Comme tu disais j’ai beaucoup enchaîné. Donc forcément après celui-là, je vais un peu me calmer. Je suis la tête dans le guidon depuis des années. Lord Esperanza, c’est le projet de ma vie. J’ai tout donné, j’ai fait des sacrifices. Le paradoxe, c’est que c’est que l’infime partie du début. Mais je suis prêt à tout pour ce projet, dans le sens positif de la chose bien entendu. Donc, j’ai toujours peur que ça ne marche plus en fait. L’industrie dans laquelle on est évolue très rapidement. La demande est grandissante, mais l’offre aussi. C’est incroyable le nombre de rappeurs, d’artistes sur la scène actuelle, la plupart sont très doués. 

J’ai toujours peur que ça ne marche plus en fait

Mais dès que j’ai cette peur, je me dis que si je suis là c’est qu’il doit bien y avoir une raison. C’est un peu un syndrome de l’imposteur. Tu charbonnes pendant des années, tu rencontres plein de gens, tu fais tout pour que ça marche. Et quand ça commence à marcher, tu te demandes si tu es vraiment légitime. C’est un peu bizarre. Même si je pense que ça fait écho à certains trucs de mon enfance, mon daron qui m’a dit que j’y arriverai pas. 

Donc voilà, ça serait ma crainte. Et en même temps, cette crainte, elle disparaît vite. C’est lunaire. Tous les jours je reçois des messages de gens qui me disent que je les aide. Que je les ai aidés à ne pas se suicider. Je me dis ouah. C’est fort. C’est l’ampleur donnée par les réseaux sociaux. 

Après, mes autres peurs sont plus intimes. Mais tu sais quoi ? Je crois que je suis assez heureux. Je fais ce que j’aime. Ça me permet de gagner très bien ma vie. Je rencontre plein de gens, je travaille avec des gens géniaux, que j’ai choisi. Rien que ça, c’est pas donné à tout le monde de pouvoir choisir ses partenaires. 

Je crois que je suis assez heureux. 

C’est cool d’entendre ça. 

Je souffre pas. Je suis mon propre patron. Je peux faire les projets que je veux. Il y a des gens d’expérience qui me donnent de l’argent pour le faire. C’est pas toujours rose, mais j’ai moins le droit de me plaindre. Parce que je vis de ma passion. Ça serait malvenu. 

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Photo : Ovah Shoot

Surtout que tu es pas enfermé dans l’image d’un monde rose, tu fais partie de cette génération qui capte que le monde n’est pas rose, et toi en l’occurence tu as démontré plusieurs fois que tu avais une conscience aiguë de l’actualité. 

Oui. Mais d’ailleurs c’est intéressant que tu le dises comme ça, parce que c’est ça qui parfois m’atteint le plus. C’est quelque chose que je dis moins en interview maintenant, parce que ça a été parfois moqué. Et je peux le comprendre. Mais j’avais dit une fois que je me connectais parfois à l’étendue de l’univers pour ressentir à quel point on est minuscules. Pour me poser des questions comme “Qu’est-ce qu’on fout là, au milieu d’un océan noir ?”. 

Il y a des journalistes qui se moquaient de moi, et ils avaient eu raison, je suis un bon client pour ça. C’est vrai que la phrase est grandiloquente. Mais en vrai c’est ce que je ressens. Il y a un truc d’empathie. C’est au quotidien tout remettre en question. On est des grains de sable dans des déserts d’étoiles. 

Ça ne répond pas à tout, il y a des réalités plus palpables, comme remplir le frigo c’est sur. Ce n’est pas la réponse à tout, ce n’est pas aussi simple, mais parfois ça fait du bien de remettre en perspective. 

Quand tu gagnes ou que tu perds des abonnés, ou des streams, parce que ça marche dans les deux sens, que tu gagnes ou que tu perdes, ça fait du bien de se dire que ça ne change pas grand chose, que ça reste de la musique. 

On est des grains de sable dans des déserts d’étoiles.

Enfin, dernière question, tu la connais, si ça se trouve tu t’y es préparé : Qu’est-ce que ça t’évoque la Première Pluie, Lord Esperanza ? 

Aha, non, je n’ai pas préparé une réponse. Il faut que ça soit spontané. 

En fait, j’aimerai me rappeler ce que j’ai répondu à l’époque pour ne pas dire la même chose. 

Je te le dirai après. On comparera. 

Il y a un truc de fraîcheur. Un truc d’espoir aussi. Ça peut être la pluie tant attendue par les peuples des régions désertiques, comme un bienfait du ciel pour nourrir les terres et les familles. Je trouve ça beau comme nom. C’est hyper évocateur d’un renouveau. C’est vrai que c’est cohérent avec l’interview, et ce qu’on a dit sur ce projet international, dans le sens où il intervient à un moment où ma charte artistique est plus décomplexée et que musicalement il y a l’exploration de nouveaux horizons. Ça résonne d’autant plus comme une nouvelle pluie, comme une première pluie. 

Alors il faut que tu deviennes le parrain de la nouvelle saison de Première Pluie. 

Avec plaisir.

Si tu veux je te lis ta précédente réponse. Tu faisais référence à une de tes lines : “Pas né de la dernière averse, mais il s’avère que je persévère”. Tu évoquais également l’émission de Jean Claude Ameisen, sur les épaules de Darwin, dont on est fans tous les deux, sur un papillon rare en Amazonie. 

Ah exact je m’en souviens très bien ! Aujourd’hui ça m’évoque autre chose, ça m’évoque Eliott Schonfeld, un aventurier français qui a fait un film sur un aventurier (Raymond Maufrais, ndlr) des années 50 qui n’est jamais revenu de sa traversée de l’Amazonie. Donc oui Eliott Schonfeld, c’est quelqu’un qui a tout lâché pour devenir un aventurier 2.0. Il filme son quotidien et tout ce qu’on ne peut pas imaginer. C’est un mec hyper connecté à la nature et aux problématiques écologiques. 

C’est précieux et cohérent comme conseil, d’aller voir les films d’Eliott Schonfeld, pour terminer cette discussion au coeur du monde. Merci pour tout, merci d’être notre parrain, longue vie à ce nouveau projet et à bientôt. 

Merci à toi, on est ensemble, on est sur la même longueur d’ondes. Et merci pour ton écoute et tes questions pertinentes. Bon courage pour la suite.


Entretien réalisé par par Sébastien Bordel / Photo de couverture : Jason Piekar 

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Dans ta ville – Ep 2 est disponible ici. Paramour x Sony.