C’est une affaire qui semble inventée pour les besoins d’un mauvais téléfilm ou d’une série Netflix à gros budget, tout se croise : secrets inavoués, misogynie de l’époque et rebondissements inattendus. Malheureusement, la vérité définitive s’est sans doute éteinte aujourd’hui, jeudi 11 avril à Cannes, en même temps que la principale intéressée, Simone Weber. 

Née à Ancerville, dans la Meuse, en 1929, Simone a 5 enfants avec un premier époux, alcoolique, qu’elle met à la porte. Toute sa vie, elle exerce de petits boulots pour subvenir aux besoins de sa famille. Très atteinte par la mort de deux de ses enfants, très jeunes, elle sombre progressivement dans la mythomanie et la paranoïa. 

Pour dater une affaire judiciaire, il suffit parfois d’un petit prélèvement dans le qualificatif attribué au coupable. À la coupable en l’occurrence. Il est à peu près midi le jeudi 11 avril quand les agences de presse et les grands titres se fendent d’une notification laconique : la diabolique de Nancy est morte. Le 28 février 1991, elle avait été reconnue coupable devant la cour de Meurthe et Moselle de son ancien amant, Bernard Hettier. Ce jour-là, la prévenue est condamnée à 20 ans de réclusion criminelle. 

Pourtant, la peine aurai pû être bien plus lourde. Ce jour de février, Simone Weber est acquittée pour l’empoisonnement présumé de son second mari, Marcel Fixard, 80 ans, décédé d’une crise cardiaque le 14 mai 1980 à Rosières-aux-Salines en Meurthe et Moselle. Un destin amoureux tragique, qui lui avait valu de nombreux soupçons. Comme dans de nombreuses affaires, deux camps s’opposent, celui où on pense qu’elle est coupable d’avoir tué aussi Marcel Fixard, pour toucher son héritage, et celui où on la juge innocente de cette première mort. 

Bernard Hettier, dont Simone Weber n’a jamais avoué le meurtre, était ouvrier dans l’industrie chimique. Il a disparu à Nancy à 55 ans, le 22 juin 1985. Il raconte avoir été harcelé pendant des mois par Simone Weber, dont il ne voulait pourtant plus entendre parler, après une relation d’un an, entamée en 1981. Un tronc humain, qui lui a été attribué, a été repêché dans la Marne à Poncy, le 15 septembre 1985. Les faits établis veulent que Simone Weber aurait découpé le corps à la meuleuse à béton, juste après avoir tué l’homme. Lors du procès, les jurés n’ont pas retenu la préméditation. 

Simone Weber a été libérée pour bonne conduite en 1999 et s’est établie sur la Côte d’Azur. Elle est morte à Cannes, à 94 ans, jeudi 11 avril 2024. Sans avouer pour le meurtre de Bernard Hettier, et encore moins pour celui de Marcel Fixard. 

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Arthur Guillaumot

Photo de Une : Simone Weber photographiée lors de sa condamnation à 20 ans de réclusion criminelle, devant la cours d’assises de Nancy / STF pour l’AFP