C’était il y a 10 ans aujourd’hui. Sur les murs de Deraa, une ville du sud-ouest de la Syrie, des enfants écrivaient “Ton tour est arrivé, Docteur”. L’élan des Printemps arabes se diffusait dans le mois de mars syrien. Là aussi, on voulait se débarrasser de l’héréditaire dictateur local.  Le docteur, c’était Bachar el-Assad, ophtalmo de formation, et dix ans plus tard, il est toujours à la tête de la Syrie. Son surnom a changé, maintenant on l’appelle le Boucher de Damas. Et le pays est en ruine. 

Un conflit nébuleux, qui a vu s’opposer le régime et les rebelles, l’incursion et l’instauration du califat djiahdiste, l’héroïsme des kurdes, la guerre de position de la coalition internationale, les ingérences turques. Il y aura eu la torture et l’utilisation des armes chimiques par le régime, la fameuse ligne à ne pas franchir selon Barack Obama. Allègrement franchir par Bachar, dont l’ignominie méticuleuse à l’égard de son propre peuple n’a eu d’égal que la barbarie djihadiste. 

Un enfant et des obus dans une décharge de la région d’Idlib, en mars 2021 /  AFP / AAREF WATAD

La drame syrien, c’est l’histoire d’un rêve de liberté, qui se termine comme un cauchemar dont la seule issue est le départ. C’est l’histoire d’une crise migratoire dans laquelle la France n’a pas été à la hauteur. Où l’Allemagne a relevé le défi, au même titre que quelques autres pays européens comme la Suède. C’est l’histoire de réfugiés gérés comme du bétail ou des monnaies de chantage, en Grèce, en Turquie ou aux portes de l’Angleterre. 

10 ans après, on continue de demander l’ouverture de corridors sanitaires.

Voilà les chiffres d’un collectif d’ONG, depuis 2011* :

  • 400 000 morts
  • 6 000 000 de réfugiés 
  • 6 000 000 de réfugiés internes 
  • 2 500 000 enfants privés de scolarité
  • 1 500 000 syriens sont invalides
  • 60 % des syriens vivent dans l’insécurité alimentaire 
  • 80% des syriens vivent sous le seuil de pauvreté 

C’était il y a 10 ans, et c’est encore maintenant. Il n’y a pas eu de printemps, et le boucher de Damas est toujours au pouvoir, malgré ses crimes de guerre. Les derniers rebelles sont affiliés aux derniers djihadistes, à Idlib notamment, dans le nord-ouest. Les kurdes, héros de la guerre au sol contre les djihadistes, ont été trahis par la coalition, et massacrés par les incursions turques dans le nord. La Syrie est en cendre, en ruines, et l’espoir des enfants de Deraa a été volé.

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Arthur Guillaumot / Photo de Une : DELIL SOULEIMAN / AFP

*Pour 22 millions d’habitants en 2011.