Poupie vient de sortir son premier album. Enfant Roi est le carnet de bord d’une enfant du siècle. On s’habitue depuis deux ans à voir son nom associé aux meilleurs incendies, aux feux les plus éclatants. La recette Poupie, c’est l’alignement d’une langue chaude, qui claque comme des détours ensoleillés, et de mélodies précises et volcaniques. Alors, il est comment ce premier album ? Petit caprice ou heure du sacre ? 

Dans cette intro, la référence à Alfred de Musset n’est pas gratuite. Dans la Confession d’un Enfant du Siècle, son roman autobiographique daté de 1836, Alfred de Musset témoigne du malaise existentiel d’une génération, qui vient de voir chuter Napoléon, sur fond de désillusion amoureuse en deuxième partie. Figurez-vous qu’Enfant Roi suit une ligne similaire. 

La première partie de l’album est consacrée à des préoccupations assez universelles, et notamment l’argent. Une façon de réussir comme une autre, comme dès Filage et faits, Tiens-toi bien ou Dollars. Ce thème de la réussite est une obsession, à mi-chemin entre l’argent et les gens, puisque le centre du projet se déploie sur cette dualité. Fini la légèreté des dollars, mais est-ce qu’on doit déjà parler d’amour ? Poupie s’interroge sur les directions à prendre, quitte à fuir, c’est le cœur de chansons comme Comme les autres, Feux ou Thelma et Louise et même Mojito et Bolide

Puis à la fin de l’exercice, la matière devient beaucoup plus intime, on passe sous la parure de billets pour goûter une mélancolie beaucoup plus profonde. Celle des tours d’ivoire, des reines solitaires, qui lâchent des larmes dans les stations essence, quand le Bolide, ou la fusée, très employée, tombe en panne. Enfant roi, c’est un doux rêve, fait de dollars, de carrosse, qui voit la protagoniste se réveiller en sursaut au milieu. Ça donne trois chansons, Pur, Si bas et Vue sur la mer, d’une beauté vertigineuse, qui disent les doutes, les aveux, les regrets, la solitude des altitudes dans une sincérité sans fard. 

Fred Dugit pour Le Parisien

Le feu sacré, c’est finalement ce qui fait le lien dans la musique de Poupie, mélange gourmand de reggae, de ragga, aux ascendants latino, où la culture et les flows rap ne sont jamais loin. En français, en espagnol et en anglais, avec toujours autant d’aisance. Musicalement, le projet est très libre et porte le label qualité de producteurs comme les Itzama ou Shawondasee réunis sous la bannière Soma. Poupie a fait un premier album générationnel, qui termine le travail entamé avec ses deux premiers eps, Poupie (2019) et Feu (2020), dont on retrouve aussi le feat éponyme avec Jul. Tout est à première vue léger, mais c’est comme un tableau de Salvador Dalí, on en a pour longtemps, d’un univers total. 

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Vous pouvez accéder à la boutique de Poupie en cliquant ici.

Prenez ici vos places pour aller voir Poupie à L’Autre Canal à Nancy le 8 décembre 2021.

Arthur Guillaumot