Originaire du 94, Kyana a longtemps fait du violon au conservatoire, avant de commencer à écrire, à chanter et à enregistrer. Quelques mois après la sortie de son deuxième ep Bonjour Tristesse, Kyana enchaîne les scènes en première partie d’Eva. On a discuté avec elle à L’Autre Canal à Nancy, juste après son concert. 

Arthur : Tu viens tout juste de sortir de scène, quel espace c’est pour toi ?

Kyana : La scène c’est quelque chose qu’au début j’appréhendais pas mal parce que j’en avais jamais fait. Depuis un an que je fais des concerts, j’apprécie de plus en plus rencontrer les gens et partager mes sons.

Arthur : J’ai l’impression que dans ton parcours il s’agit étape par étape d’oser faire des choses que tu n’aurais pas imaginé. Faire de la musique, puis chanter, enregistrer en studio, puis sortir des sons sur les plateformes et jusqu’à la scène. Tu l’as vu comme un échelonnage avec le temps ?

Kyana : De fou oui. J’ai pris pas mal de temps avant de sortir mes sons et même de dire que je voulais faire de la musique. Ce que je kiffe c’est que je me découvre. À chaque projet, j’essaie de tester des choses avec lesquelles je ne suis pas vraiment à l’aise, ou de nouvelles sonorités. C’est le principe en fait. Et comme ça, le public peut évoluer avec moi, apprendre à me connaître et inversement. J’aime beaucoup ça. 

Arthur : Qu’est-ce que tu as découvert sur toi en faisant de la musique ? 

Kyana : J’apprends à oser un peu plus. J’essaye de m’assumer et prendre confiance en moi un peu plus à travers ma musique. Je n’aime pas parler de moi, je suis assez introvertie mais j’apprends à m’exprimer à travers ma musique et je me découvre. 

“À chaque projet, j’essaie de tester des choses avec lesquelles je ne suis pas vraiment à l’aise, ou de nouvelles sonorités.”

Arthur : Ça paraît presque paradoxal ! Tu fais de la musique, tu vas sur scène. Comment ça s’est passé pour que tu oses faire tout ça ? 

Kyana : J’ai fait du théâtre en improvisation pour vraiment apprendre. Je savais que j’allais avoir des scènes et j’avais vraiment envie d’être sûre de moi donc j’ai pris des cours de théâtre. 

Arthur : Pour oser ?

Kyana : Oui c’est vraiment une façon d’oser. Tu te dis “Sois toi-même, assume qui tu es jusqu’au bout”. 

Arthur : L’image compte aujourd’hui beaucoup dans un projet musical. C’était aussi une façon de créer la tienne sans que les autres projettent des choses sur toi ?

Kyana : Justement c’était du théâtre d’impro, sans véritable rôle. On te donne un mot et tu dois créer une scène de A à Z sans réfléchir à quoi que ce soit. La scène c’est un peu pareil. On a nos sons, on sait ce qu’on va faire, mais on peut improviser, on peut refaire un couplet ou un refrain, changer des notes. 

Arthur : Comme dans les morceaux de jazz que tu écoutais, notamment quand tu étais plus jeune. C’est une musique qui est faite d’improvisation, tu aimerais aller vers ce genre de musique un peu instinctive sur scène ? 

Kyana : Mon rêve c’est vraiment d’avoir des musiciens sur scène, pour pouvoir échanger avec eux. Là je n’ai même pas de DJ et je suis en train de me rendre compte que c’est peut-être mieux de ne pas être seule sur scène même si c’était un choix au début et que ça m’a permis d’apprendre beaucoup de choses. 

Arthur : Oui, là tu es vraiment toute seule contre un public très vaste. 

Kyana : De fou. Surtout quand tu commences la scène et que c’est pas forcément ton public. Quand tu es un artiste en développement, tu fais des premières parties et les gens ne te connaissent pas forcément. C’était compliqué au début mais les gens sont très bienveillants.

Arthur : Qu’est-ce que ça t’a permis d’oser justement ? Le fait de te retrouver dans des villes que tu connais pas, devant des publics qui ne te connaissent pas ? 

Kyana : C’est la première fois que j’accompagne une artiste en tournée. On ne se connaissait pas du tout avec Eva mais on a discuté. Elle était contente de ce que je faisais et je suis contente d’être ici. Ça me permet de découvrir des villes. J’ai fait Bordeaux, Toulouse, là je suis à Nancy. Je n’ai jamais été dans ces villes en tant qu’artiste donc ça me régale de fou. 

“Mon rêve c’est vraiment d’avoir des musiciens sur scène.”

Arthur : Qu’est-ce que tu essaies de raconter à propos de toi dans tes morceaux ?

Kyana : J’ai du mal à m’exprimer de base et j’ai vraiment ressenti ce besoin d’écrire pour me comprendre et apprendre à me découvrir. Quand je ressens quelque chose, je l’écris et je passe à autre chose. Ça me permet d’avancer. 

Arthur : Tu as un rapport instinctif à l’écriture ? 

Kyana : Oui carrément.

Arthur : Le fait d’avoir fait du violon au conservatoire et d’avoir des notions de piano et de guitare, ça a changé ton rapport à la musique et à la production ? 

Kyana : Bien sûr, le violon j’ai commencé quand j’avais 6 ans. J’ai fait : orchestre, musique de chambre, solfège, obligatoirement ça m’a donné une passion. Ma mère me faisait écouter énormément de musique, tout ça a joué sur ma sensibilité musicale. 

Arthur : Ça a dû t’aider à te faire confiance, à imposer ta légitimité notamment au moment d’échanger sur les compos, non ?

Kyana : Je connais ma sensibilité. J’ai un avis, j’ai mon oreille mais c’est compliqué à exprimer quand tu connais pas vraiment les logiciels. Je ne connaissais pas exactement les termes comme les kicks, les drums, etc. Au niveau de la mélodie, je suis à l’aise mais pour le reste, j’apprends encore.

« J’ai eu besoin d’écrire pour me comprendre. »

Arthur : Qu’est-ce qui continue à te faire peur dans la musique ? 

Kyana : C’est un métier assez instinctif en fait, comme l’écriture. Chaque jour est différent. Ce métier me fait peur de toute manière mais la musique me fait du bien et j’ai envie d’aller jusqu’au bout.

Arthur : Tu as eu des taffs alimentaires au moment où tu commençais la musique donc tu sais ce que ça représente. 

Kyana : Taff alimentaire, études, j’ai fais pleins de trucs avant de vraiment pouvoir vivre de ma musique.

Arthur : Donc ciao les études de Lettres là ? 

Kyana : J’ai fini ! 

Arthur : Oh, bien joué ! T’as une licence, un master ? 

Kyana : Je n’ai pas ma licence mais j’ai fini. J’ai fait tous mes partiels mais je n’ai jamais récupéré mes notes.

Arthur : Il paraît qu’il y avait des morceaux qui commençaient à marcher juste avant les partiels c’est ça ?

Kyana : C’est ça. Grâce à ça j’ai pu aller devant mon père et dire “papa je vais faire de la musique”. De toutes façons, je ne voulais pas faire de master. 

“Là je suis sur un projet pour la fin de l’année ou le début de la suivante.”

Arthur : Le futur, il est excitant ou effrayant  ? 

Kyana : Les deux. Plus excitant en vrai. Comme j’ai dit, il y a pleins de choses qui peuvent faire peur dans la vie. Je suis trop contente de ce que je fais. C’est une chance et en même temps, c’est un travail.

Arthur : Comment ça se passe quand tu te lances sur un nouveau morceau ? 

Kyana : Moi j’aime bien arriver avec des playlists de sons ou des couleurs. J’ai envie que ce son il soit, ça va peut-être te paraître bizarre, dans des tons de bleu. Sinon je fais des moodboards et j’ai des playlists en mode “ah j’aimerai bien partir dans ce style de son”. Comme je travaille beaucoup avec les mêmes équipes, ils me connaissent de plus en plus donc ils savent. Ils me comprennent, eux aussi ils sont crazy de fou donc ça va on parle en mood. 

Arthur : Ça va ressembler à quoi la suite ? 

Kyana : Là je suis sur un projet pour la fin de l’année ou le début de la suivante. Je travaille dessus depuis Bonjour tristesse et j’ai trop hâte.

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Interview : Arthur Guillaumot, réalisation et montage : Diego Zébina, ingé son : Joshua Thomassin, retranscription : Alexandre Barreiro

Nous remercions Marianne Thiry chez Sony, et Inès Harkati qui accompagnait Kyana à L’Autre Canal.

Interview réalisée à L’Autre Canal, disponible également sur Splash, leur blog super cool.