< Tous les articles faits-divers Magazine L’art & la manière — L’histoire du voleur des musées Stéphane Breitwieser Par Carol Burel 22 octobre 2025 Entre 1994 et 2001, le jeune Mulhousien Stéphane Breitwieser a volé 239 œuvres à 170 musées répartis dans sept pays européens, pour un butin estimé à plusieurs dizaines de millions d’euros. Le mode opératoire et le dénouement de cette histoire en font l’une des plus grandes affaires de vol d’art de tous les temps. Liste illustrée des œuvres volées Il ne faut pas longtemps pour qu’un promeneur remarque que des objets brillent dans l’eau. Le 27 novembre 2001, 107 œuvres d’art provenant de musées de toute l’Europe sont retrouvées dans le canal du Rhône au Rhin. Les enquêteurs, effarés par la valeur de ce butin, ne mettront pas longtemps avant de faire le lien avec Stéphane Breitwieser. Pour savoir comment les yeux du monde se sont retrouvés rivés sur une commune perdue au milieu de l’Alsace, il faut remonter la piste du Mulhousien surnommé au début des années 2000 : « l’Arsène Lupin des musées ». Tout a commencé par le vol d’un pistolet à silex à Thann, en 1994. Le jeune homme âgé d’une vingtaine d’années fixe l’objet, qui lui rappelle celui que possédait son père. Une vitrine, pas de sécurité : il n’en faut pas plus pour le convaincre. Il s’en empare et le cache sous son manteau pendant que sa compagne, Anne-Catherine Kleinklaus, fait diversion. Ce vol, impuni, sera le premier d’une longue série, qui s’étale sur six ans. Ce qui impressionne, ce n’est pas seulement la quantité d’œuvres volées mais le mode opératoire. Stéphane n’a rien d’un gangster. Il agit en plein jour, dans des musées de petites villes et se cache dans les toilettes pour retirer les cadres des tableaux qu’il prend. Quand ça ne passe pas sous le manteau, il redouble d’ingéniosité. En février 2001, il décroche une tapisserie de trois mètres de long, la roule et la jette par la fenêtre pour la récupérer plus tard. Facile. “Les musées sont une prison pour les oeuvres d’art” Stéphane Breitwieser Pour les médias, c’est un escroc, pour lui, un esthète. Et pour cause : les œuvres volées ne sont pas destinées à la vente. Il les entrepose jalousement dans le grenier de sa mère, à Eschentzwiller (Haut-Rhin). Assis sur une fortune, le jeune homme, qui a quitté l’université très tôt, enchaîne les jobs mal payés. L’argent n’est pas le problème, maman lui file des ronds, l’enjeu c’est l’amour du Beau. Il martèle : “Je suis un amateur d’art éclairé. Les visiteurs ne comprennent rien. Je suis le seul à voir avec honneur ces œuvres. Je dois donc les soustraire des musées, qui ne s’en occupent pas bien.” ¹ Ce qui fascine aussi, c’est sa personnalité, que décrit Michael Finkel, journaliste américain, qui se passionne pour son histoire et lui dédie une vaste enquête². Stéphane est un jeune homme charmant, il a des yeux bleus perçants et il présente bien. Depuis petit, il cultive une passion pour les belles choses. Timbres, cartes postales, pièces de monnaie, etc. Son drame familial, c’est quand son père, vendeur aisé, quitte sa mère et prend tout son mobilier d’époque avec lui. La maison est vendue et les antiquités, remplacées par les meubles IKEA. Ce qu’il a perdu, il va le reprendre. Accompagné de sa petite-amie, avec qui il vit dans le pavillon maternel, il sillonne l’Alsace, la Suisse, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, l’Autriche et le Danemark. En 1997, il vole à la Maison de Rubens une sculpture en ivoire d’Adam et Eve par Georg Petel. À l’heure du déjeuner, quasi devant le gardien. Un jour, il profite d’un vol en cours, pour voler à son tour, pendant que le suspect se fait arrêter. Sa chance semble ne pas avoir de limites… ou presque ? « Il fallait laver la maison » Mireille Stengel, aux enquêteurs, interrogée sur la raison pour laquelle elle a détruit la collection de son fils. À Lucerne, en 1997, pour le vol d’une nature morte dans une galerie d’art, il écope de huit mois de prison avec sursis et trois ans d’interdiction d’entrée en Suisse. Mais cela ne suffit pas à l’arrêter. Le 20 novembre 2001, comme toujours vêtu de son long manteau de luxe chiné en friperie, Stéphane Breitwieser retourne en Suisse, au musée Richard Wagner. Deux jours plus tôt, il y a volé un cor de chasse du XVIIe siècle et souhaite effacer ses empreintes. Au milieu du musée, très peu fréquenté ce jour-là, il se fait vite repérer et arrêter. Devant les policiers, il se confond en excuses et jure sur la Bible n’avoir jamais rien volé d’autre. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Quelques jours plus tard, dans la banlieue de Mulhouse, à Eschentzwiller, une femme débarasse son pavillon. Mireille Stengel, qui a appris l’arrestation de son fils, s’empare d’une hache et d’un marteau et détruit, de rage, une partie de l’imposant butin que son fils entreposait dans leur maison. Le reste est jeté dans le canal du Rhône au Rhin. Quand le trésor de Breitwieser est repêché, Stéphane gère mal la pression, il avoue tout aux enquêteurs. Il sera condamné à quatre ans de prison ferme, en Suisse, puis à deux ans en France. Après sa libération, lui qui aurait pu jouir tranquillement du succès de son autobiographie Confessions d’un voleur d’art, récidive. La thèse de l’esthète s’essouffle quand il se met à revendre certaines des œuvres volées sur eBay. Il se fait aussi attraper pour d’autres vols mineurs : habits, DVDs, etc. Il ne s’agit plus d’art, il ne peut plus s’en empêcher. Sa dernière condamnation, à deux ans et demi de prison, a eu lieu en mars 2023. 1 : Stéphane Breitwieser, propos rapportés par son avocat Thierry Moser. 2 : Le Voleur d’art, Éditions Marchialy, 2024. __ L’Art & la manière — article tiré de Première Pluie magazine n°15, à découvrir ici. Texte : Carol Burel Illustrations : Mathilde Petit Graphisme (dans le magazine) : Mathilde Petit À lire aussi faits-divers Magazine L’art & la manière — L’histoire du voleur des musées Stéphane Breitwieser 22 Oct 2025 Entre 1994 et 2001, le jeune Mulhousien Stéphane Breitwieser a volé 239 œuvres à 170 musées répartis dans sept pays européens, pour un butin estimé à plusieurs dizaines de millions d’euros. Le mode opératoire et le dénouement de cette histoire en font l’une des plus grandes affaires de vol d’art de tous les temps. Liste faits-divers Magazine Liste des œuvres volées par Stéphane Breitwieser 21 Oct 2025 Entre 1994 et 2001, le jeune mulhousien Stéphane Breitwieser a volé 239 œuvres à 170 musées répartis dans sept pays européens, pour un butin estimé à plusieurs dizaines de millions d’euros. Le mode opératoire et le dénouement de cette histoire en font l’une des plus grandes affaires de vol d’art de tous les temps. Voici faits-divers Magazine Malaise avec finition — La mort du maire de Germisay 09 Oct 2025 Un petit village de Haute-Marne, un Airbnb à Nancy, deux travailleuses du sexe chinoises et un maire retrouvé mort. Que s’est-il passé le 11 novembre 2018 ? Vivre à Germisay, c’est faire le choix de la tranquillité. Il ne s’y passe jamais rien — ou presque. Lové entre les champs vallonnés et les forêts de À la loupeCartes postalesÉvènementsInterviewsLittératurePlaylists