Le plus grand danger serait de s’habituer. 

Il ne faut jamais s’habituer à rien. Ni aux merveilles, ni aux drames. Il faut envisager les choses avec toujours la même émotion naïve, la même stupéfaction heureuse, la même douleur révoltée. 

Il y a deux jours, le dragon de Komodo a rejoint la liste rouge des espèces en danger, comme plus d’un tiers des espèces de requins et de raies. Des nouvelles comme ça il y en a tous les jours. On ne doit jamais s’habituer. 

Inutile ici de refaire la liste des catastrophes naturelles qui frappent la planète en permanence, et qui sont désormais le fait en majeure partie du dérèglement climatique. On ne doit jamais s’habituer. Jamais élever le drame au seuil de la banalité acceptable et impossible à changer. Si on s’habitue, on s’accommode. Alors on accepte, alors on a fini de se battre et le grand incendie nous gagnera toutes et tous. 

Ne jamais s’habituer implique une grande hygiène de l’indignation. Il n’y a pas de temps mort. C’est un exercice perpétuel, mais nécessaire. S’habituer c’est accepter. Êtes-vous prêt.es à vous habituer à des rapports du Giec toujours plus alarmants ? Ces alarmes-là ne sont pas celles d’un réveil, qu’on peut snober, pour gratter quelques minutes supplémentaires. Êtes-vous prêt.es à regarder finir ce monde ? Si on ne s’habitue pas, alors tout est encore possible. On peut encore changer – sauver – le monde. 

L’avantage quand on ne prend l’habitude de rien, c’est qu’on ne s’habitue pas non plus aux bonnes choses. On revit sans cesse des premières fois, avec une joie pure et innocente. Ne pas s’habituer, c’est siroter la beauté toujours avec la même impression de découvrir un parfum. C’est là que vous pouvez trouver ce qui fait la force de Première Pluie. 

Ce mois de septembre marque les 4 ans de l’idée de lancer le média. Il marque aussi la parution de notre premier magazine papier. Entre temps, que des émotions pures et spontanées, des premières fois qu’on revit sans cesse. Publier un article, rencontrer un artiste, prendre une photo, écrire un mail, répondre à un appel : des émotions uniques, toujours comme si c’était la première fois. Ne s’habituer à rien, c’est se laisser porter par une excitation totale, avide de regarder derrière les collines et même de combattre contre des moulins à vent. 

Septembre, c’est le début de la saison des aventures. Ne vous habituez à rien. Ne vous attendez à rien. Profitez juste du plaisir de découvrir les choses, de les envisager, puis de tenter d’influer sur leurs cours quand vous le pourrez. Prenez le temps de vous émerveiller de la forme des nuages, du ramage des arbres. Indignez-vous quand une espèce animale est menacée. Soyez fier.es de la personne que vous êtes, profitez de ce que vous faites. Etonnez-vous d’exister. 

Bref, bonne rentrée quoi. 

La rédaction de Première Pluie

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Relisez-ici les éditos de la rentrée des saisons précédentes :

Edito de la rentrée 2020 / Le monde a changé

Edito de la rentrée 2019 / Ensemble

Edito de la rentrée 2018 / Le monde est à nous

Photo de Une et de fin : Diego Zebina