Paolo Del Vecchio, artiste-footballeur au FC Metz

Article publié dans le magazine n°10, paru le 24 mai 2024.

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La saison dernière, Paolo Del Vecchio rejoint le FC Metz en tant qu’artiste-footballeur, un personnage hybride joignant les deux carrières. Dans cette résidence artistique inédite, il a conçu de nombreux maillots mais a surtout créé des ponts entre deux mondes qui se regardaient de loin : l’art et le football. Dans son atelier, directement installé dans le Stade Saint-Symphorien, on a parlé ballon rond et haute couture.

“J’étudie le football car c’est un phénomène sociétal et un langage universel. J’estime qu’il a sa place parmi les acteurs culturels. D’une manière générale, c’est bien de décloisonner les choses.” 

Né à Metz et diplômé de l’ÉSAL (École Supérieure d’Art de Lorraine, à Metz), Paolo Del Vecchio mûrit un projet unique en son genre : être en résidence dans un club de foot en tant qu’artiste-footballeur. Ou comment réunir deux disciplines qu’on pensait antinomiques. 

En juillet 2023, il signe au FC Metz pour une saison. Il assume à la fois la préparation physique et la casquette de créatif. Intégré au groupe de l’équipe réserve, il est au contact direct des joueurs. 

“Ça accentue la porosité entre la performance sportive et artistique. Un flou se crée et c’est hyper intéressant à creuser.” 

Il porte symboliquement le numéro 33, numéro attribué au joueur de l’équipe réserve sélectionné dans le groupe pro, sorte de protagoniste surprise. Une définition proche de l’artiste-footballeur : “un personnage hybride, qui brouille un peu les pistes, et qui questionne.” Un flou qui marche tellement bien qu’un agent de joueurs l’a déjà contacté : “il m’a demandé si je jouais ce week-end, parce qu’il m’avait vu sur le compte Insta du club.” Paolo s’est aventuré dans toutes les strates du club, du groupe féminin au centre de formation, des employé⸱es aux supporters. Il avait besoin que l’artiste-footballeur se déploie partout, afin que les rencontres nourrissent ses œuvres. 

“Tous mes projets sont basés sur un échange.”

Durant la saison, il a lié un rêve d’artiste et de fan de football : créer ses propres maillots, directement au stade dans son atelier. 17 maillots uniques, un pour chaque match à domicile. On retrouve un boubou greffé au maillot pro, pour témoigner de comment de l’infusion des cultures au FC Metz, club le plus sénégalais d’Europe. Un maillot passeport, où Paolo peut changer son nom par celui de son ancêtre allemand et français le plus proche, un parallèle au joueur Kévin Van Den Kerkhof, qui porte le nom Guitoun lorsqu’il joue en sélection algérienne. Les pros ont porté pour l’échauffement d’un match face à Monaco un maillot avec une carte représentant leur histoire personnelle et/ou familiale.

Le maillot de foot est devenu plus qu’une lubie de supporter, c’est un objet tendance. La mode a fait son entrée dans le sport et a emmené le maillot loin de la transpiration et des pelouses boueuses. L’exemple le plus parlant est le club de Venise, le Venezia FC, dont le maillot s’arrache dès sa sortie alors que l’équipe n’est qu’en deuxième division italienne. Une démarche marketing éloignée de celle de Paolo Del Vecchio. 

“Mes maillots n’ont pas la vocation d’être stylés, mais plutôt de questionner et de véhiculer une idée, avant même de penser au visuel. Chacun d’entre eux raconte une histoire. C’est toute la différence entre un artiste et un designer.” 

Les 17 pièces forment un puzzle, qui raconte les différentes faces de la construction de l’identité d’un footballeur et d’un artiste. Une identité questionnée à l’échelle familiale, nationale ou sociétale. Sur cette thématique, Paolo a travaillé conjointement avec les jeunes du centre de formation du FC Metz et les étudiant⸱es-artistes de l’ÉSAL. 

“Ils se sont retrouvés avec des trajectoires presque communes. C’est 2 carrières dans lesquelles on se lance sans garantie de résultat, avec une certaine passion, et où il peut y avoir un fort ascenseur social.” 

Ces ateliers l’ont motivé à reconnecter le FC Metz avec la grande institution culturelle de la ville, le Centre Pompidou-Metz, où Paolo a créé une visite destinée aux joueurs.

“J’estime que le foot fait partie des acteurs culturels. Et, d’une manière générale, je pense que c’est bien de décloisonner les choses.”

L’artiste-footballeur est un bâtisseur de ponts, qui relient des mondes plus ou moins éloignés. Même à l’intérieur d’un club de foot, le lien entre la direction et les supporters est fragile. Paolo a tenu à les intégrer à sa démarche, qu’ils puissent la comprendre et se l’approprier, sur la toile et au stade. Le 4 février, il a organisé une exposition avant un match, pour présenter ses créations et échanger avec les fans. En parallèle, il leur dédiait un des 17 maillots, Reverse Idol, sur lequel il récolte leurs autographes.

Avec ces “maillots-oeuvres”, comme il les appelle, Paolo a mis de la lumière sur la saison du FC Metz, qui en a parfois manqué sur le plan sportif. Il a diversifié les attaches, pour tisser des liens entre deux mondes jusque-là dédaigneux l’un envers l’autre. Le messin a montré l’utilité de la démarche artistique dans le domaine sportif, tout en prouvant que le foot a une place à prendre dans le secteur culturel. La première pierre est posée. 

“Je pense qu’on est à 40-50% du projet, on peut aller encore vraiment plus loin.” 

Paolo aimerait prolonger l’aventure au FC Metz, il a envie de développer ses ambitions et sa créativité au maximum, et les acquis de cette saison pilote étaient nécessaires. Sur le long terme, l’artiste-footballeur ne se pose pas de limites. 

“L’idéal serait de faire un an de résidence, à chaque fois dans un pays différent.” 

Et, à peine sorti de sa première saison, il a déjà pensé à l’après-carrière.

“Peut-être que je deviendrais agent d’artistes-footballeurs ? ll y a maintenant un championnat de E-Ligue 1 (championnat d’Esport, ndlr), pourquoi pas un championnat d’Art-Ligue 1 ?”

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Tous les projets de l’artiste-footballeur sont à retrouver sur : residenceadomicile-fcmetz.com et sur le compte Instagram de @paolo.del.vecchio.