< Tous les articles Magazine portrait Thana Nanou, devenue star sur TikTok en embaumant les morts Par Clara Hesse 24 janvier 2025 Thanatopractrice et créatrice de contenu, Stéphanie Sounac, 40 ans, plus connue sous le nom de @Thana_Nanou raconte à ses milliers de followers les coulisses de son métier si particulier. Sorti le 24 octobre dernier, Les yeux qu’on ferme, son premier récit, pourrait bien changer votre perspective sur la mort mais aussi sur la vie. Portrait. Lunettes papillon sur le nez, rouge à lèvres impeccablement posé, parée d’un de ses fameux cols Claudine, son accessoire fétiche assumé dans ses vidéos, « Nanou » pour les intimes — Stéphanie Sounac de son vrai nom — raconte à ses milliers d’abonné·es sur Instagram et TikTok les coulisses et le cœur de son métier si particulier : depuis dix-sept ans, celle qui vient de souffler ses quarante printemps exerce la profession de thanatopractrice. “C’est ce métier qui m’a appelé, c’est lui qui m’a choisi”, explique-t-elle. Avant d’embrasser sa destinée, longtemps Nanou a été “en colère contre la mort”. Son père est décédé alors qu’elle n’avait que 7 ans et la petite fille qu’elle était n’a vu ni corps ni enterrement. “Quand tu es enfant, les adultes décident à ta place.” Amputée d’une partie de son deuil, elle se demandera pendant des années : “Est-ce bien sûr que papa est mort ?« Puis au sortir de l’adolescence elle découvre qu’il existe des personnes chargées de préparer les corps des défunts pour ralentir le phénomène de décomposition. À ses yeux, ces magiciens du funéraire “travaillent avec les morts pour apaiser les vivants.” C’est la révélation. Cette confidence, Stéphanie Sounac la livre avec bien d’autres au fil des 245 pages de son premier récit Les yeux qu’on ferme, sorti à la fin du mois d’octobre. “C’est ce métier qui m’a appelé, c’est lui qui m’a choisi” Je ne sais pas vous, mais quand je pense au quotidien d’un thanatopracteur je pense à Federico Diaz dans la série Six Feet Under (si vous n’avez pas la référence foncez la binge watcher !). Ça fait rire Nanou qui la regarde au moins une fois par an. “C’est très ressemblant”, concède-t-elle. À la seule différence que la Meusienne d’adoption parcourt 4000 à 5000 km par mois, pour se rendre au chevet des défunts dont elle doit s’occuper, qu’ils soient dans la chambre funéraire d’une entreprise de pompes funèbres, dans la chambre mortuaire d’un établissement de santé ou bien encore d’un Ehpad. Aussi, ses journées sont rythmées en fonction des appels qu’elle reçoit. “Chaque thanatopracteur travaille avec une entreprise de pompes funèbres, ce sont eux nos clients.” Même si les particuliers peuvent directement la solliciter pour réaliser un soin de conservation. “Mais la plupart des gens ne le savent pas”, se désole celle qui use de ses réseaux sociaux pour lutter contre la désinformation et les idées reçues qui entourent sa profession. Pourtant ces moments avec les familles sont précieux, ils permettent d’en savoir plus sur le défunt à préparer. “De savoir si Mamie aimait bien avoir la petite frange ou la mèche sur le côté.” D’ailleurs, bien renseignés sur la possibilité de pouvoir faire appel à ses services, “il arrive de plus en plus souvent” qu’un·e des 430 000 abonné·es composant sa communauté la choisisse, elle, pour sa douceur et son humanité. Pour ceux chez qui la thanatopraxie créerait des vocations, de son oeil d’indépendante Nanou prévient “c’est un métier difficile” : pas d’horaire fixe, la mère de famille travaille 7j/7 et ne prend jamais de vacances depuis qu’elle a lancé sa propre société. “On ne sait jamais à quelle heure on commence ni à quelle heure on termine car ce n’est pas parce qu’on m’appelle pour deux défunts qu’il n’y en aura pas d’autres dans la journée”. Ses interventions durent en moyenne une heure et demie “sur un corps intègre”, précise-t-elle, même si elle a déjà passé huit heures d’affilée sur un même défunt. Physiquement aussi c’est difficile, car elle doit manipuler seule les corps. Et comme dans tous ces métiers de l’ombre, il faut aimer la solitude. Enfin, et c’est peut-être le plus dur à évaluer, “on travaille tellement proche de la mort qu’être thanatopracteur nécessite une certaine stabilité psychologique personnelle”. D’où la nécessité d’un stage obligatoire pour valider son diplôme de jeune thanatopracteur. “On ne doit pas mourir avec nos morts.” Avant la Meuse, dont elle est tombée amoureuse, Nanou a eu la chance d’exercer dans d’autres régions et d’observer des rites funéraires différents. “Par exemple, si dans le Sud, on veille longtemps les morts cercueil ouvert, dans le Nord ce dernier est fermé.” Et de côtoyer des professionnels du funéraire étrangers qui ont fait évoluer sa pratique du métier. “Des belges m’ont appris des techniques de conservation que j’ignorais : chez eux les corps peuvent être inhumés bien au-delà de quatorze jours calendaires, qui est le maximum légal chez nous. Donc ils savent réaliser des soins de conservation pour une durée beaucoup plus importante. Avant, je n’avais pas conscience que c’était possible.” Et de résumer : “C’est un domaine dans lequel on apprend éternellement.” Si elle ne sait pas toujours de quoi sont décédés les défunts dont elle s’occupe, que la mort soit naturelle, accidentelle ou criminelle, son approche reste la même. “Dans ce métier on ne peut pas se laisser atteindre par certains facteurs extérieurs”, explique-t-elle, balayant d’un revers de la main l’idée qu’une mort liée à un fait-divers pourrait être différente à appréhender pour elle. “Mon objectif va être le même : donner tout ce que j’ai pour que la famille puisse se recueillir sans traumatisme supplémentaire.” Si rien de particulier ne l’a choquée au cours de ses années de pratique, les cas de suicide la renvoient à l’extrême solitude des uns — une triste réalité que lui a appris son métier. “Ce qui m’est parfois difficile de constater c’est que les gens sont capables de bien des choses pour mettre fin à leurs jours.” “Je me suis toujours promis que le jour où je commencerai à cauchemarder, j’arrêterai.” Avec les années, son rapport à la mort a changé. “Auparavant je ne supportais pas que des proches meurent mais je me suis rendue compte en pratiquant ce métier que le plus difficile est pour ceux qui restent.” Et forcément son rapport à la vie a lui aussi évolué. “On ne doit pas mourir avec nos morts. Au contraire, on doit vivre deux fois plus : pour nous et pour eux. Pour tout ce qu’ils ne peuvent plus faire.” Est-ce que certains soirs son métier l’empêche de dormir ? “Jamais. Je me suis toujours promis que le jour où je commencerai à cauchemarder, j’arrêterai.” Aussi, quand Nanou ferme ses yeux : “Tout est apaisé.” La suite ? “Je n’ai jamais rien calculé, alors je vais continuer à me laisser porter par la vie comme je l’ai toujours fait.” __ Suivez Thana Nanou sur Instagram et sur TikTok. Son livre, Les yeux qu’on ferme, est paru le 24 octobre 2024 aux Éditions 41. À la vie, à la mort — article tiré de Première Pluie magazine n°12, à découvir ici. Texte : Clara Hesse Photo : Jeffo Tableaux Graphisme (dans le magazine) : Mathilde Petit À lire aussi Magazine portrait Thana Nanou, devenue star sur TikTok en embaumant les morts 24 Jan 2025 Thanatopractrice et créatrice de contenu, Stéphanie Sounac, 40 ans, plus connue sous le nom de @Thana_Nanou raconte à ses milliers de followers les coulisses de son métier si particulier. Sorti le 24 octobre dernier, Les yeux qu’on ferme, son premier récit, pourrait bien changer votre perspective sur la mort mais aussi sur la vie. Portrait. portrait Sport Magda Wiet-Hénin : « Avec du travail, on peut arriver jusqu’à cette médaille » / Portrait 08 Août 2024 Magda Wiet-Hénin a commencé le taekwondo à 6 ans, au Punch Nancy, l’emblématique club de sports de combat de la ville. On l’y retrouve, 22 ans plus tard, au milieu des décorations à son effigie. Championne du monde en titre dans sa catégorie des -67 kg, elle est la favorite pour prendre l’or aux JO portrait Sport Théo Curin, nage libre 14 Juin 2024 Même s’il est toujours très attaché à Lunéville, sa ville d’origine, Théo Curin ne tient pas en place. Amputé des quatre membres à l’âge de 6 ans, ça ne l’a pas empêché d’enchaîner les défis à la nage ou sur un vélo. Conférencier, mannequin, chroniqueur télé, acteur, plusieurs fois médaillé aux Championnats du monde paralympiques, À la loupeCartes postalesDossiersHoroscopeInterviewsPlaylists