Micropolis, temps-fort des spectacles itinérants, prend place à la Manufacture du 21 au 24 mars. On vous partage nos ressentis, à chaud, sur tout ce qu’on y voit. Venez, c’est le printemps et le théâtre se présente sous toutes ses formes.

NOTRE PROGRAMME DE MICROPOLIS JUSTE ICI.

Canines de lait, de Charlotte Lagrange

« On ne mangera plus les enfants innocents, on dévorera les mauvais parents« 

Face aux tensions grandissantes entre ses parents, une petite fille prénommée Zora trouve refuge dans son imagination, où elle se pense vampire. Pièce créée pour se produire en appartement, elle est présentée pendant Micropolis dans une salle de l’IECA, l’école de cinéma de Nancy. On est en contact direct avec l’intime de cette famille qui se déchire. Un père violent, une mère dépassée, et une fille obligée de s’imaginer le monde par ces rapports conflictuels. Comment la violence se transmet, presque de façon héréditaire. Comment les enfants reproduisent chaque comportement vu, chaque phrase entendue. Comment le conte et le fantastique deviennent la seule façon de dire, pour ne pas être assaillis par le débordement de violence physique et psychologique qui se joue. Zora comprend tout ce qui se passe, mais elle est obligée de s’imaginer monstre pour l’expliquer. « Être un monstre ce n’est pas inné, ça s’apprend« . Canines de lait est une plongée dans la magie juvénile, tâchée par les déchirements familiaux.

Simon Gosselin

Vendredi 22 mars à 15h et à 18h30. IECA, 10 Rue Michel Ney. 1h. Dès 12 ans. Réservez vos places.

L’addition, de Tim Etchells

« Qui paie ? Ça ne peut pas être nous, on travaille, Ça ne peut pas être vous, vous avez déjà payé votre billet« 

Une scène burlesque dans un restaurant, avec juste un client et un serveur, se joue et se rejoue en boucle jusqu’à ne plus pouvoir la supporter, ou à y prendre goût. Tim Etchells, metteur en scène anglais, travaille sur la remise en cause du rapport au public. Dans L’Addition, il est utilisé pour être surpris. Oui, ce soir, vous ne verrez qu’une scène se jouer, et en plus on va vous le raconter en avance. Vous saurez donc tout de ce que vous allez voir, alors la question est : est-ce que vous avez encore envie de rester ? La pièce est une bouffée d’air humoristique, portée par le génie des performeurs Bert & Nasi et par une musique saillante, rythme cardiaque du spectacle. Elle offre en deuxième lecture comme un « essai » sur la proposition théâtrale : son intérêt, son coût, et sa fausse réalité admise. Créée pour le dernier Festival d’Avignon, L’Addition rallie tout le monde autour de la seule règle qui importe : la volonté de jouer. Article complet sur le spectacle, vu au CCAM.

Christophe Raynaud de Lage

Vendredi 22 mars à 21h et samedi 23 à à 18h. Théâtre de la Manufacture – Grande salle. 1h10. Dès 12 ans. Réservez vos places.

Seuil, de Pierre Cuq

« Le collège décide de rien, c’est que des murs« 

Mattéo, un adolescent de 13 ans s’est suicidé. Une enquête est lancée dans son collège pour remonter les traces de sa détresse, par le prisme de son meilleur ami Noa. Ce dernier a intégré une nouvelle chambre d’internat, où les deux résidents le bizutent. Noa tente de changer pour leur résister, de devenir un « homme« . Il devient l’agresseur pour ne plus être l’agressé. Seuil montre crûment comment les injonctions à la masculinité peuvent transformer des adolescents en hommes violents. Comment le manque de repères et d’accompagnement de notre modèle social et scolaire peut mener à des drames. Le public, disposé en bi-frontal dans la salle de la Fabrique, se voit réagir. Il est aussi lui-même en train d’entourer le jeune Noa, ne lui laissant aucune autre porte de sortie que la violence. Seuil est un spectacle poignant, abordant avec intelligence les structures de harcèlement et l’abandon de ces adolescents. Comme un symbole, il n’y a qu’un personnage adulte, l’enquêtrice. Et elle intervient, forcément, après les faits.

Alban Van Wassenhove

Vendredi 22 mars à 14h30. Théâtre de la Manufacture – La Fabrique. 1h30. Dès 14 ans. Réservez vos places.

Les hamsters n’existent pas, de Antonio Carmona

« Une larme s’est échappée des yeux du père« 

Baptiste, 7 ans, a un hamster, Bubulle. Les deux lient une amitié fusionnelle. À tel point que la séparation de ses parents ne gêne pas tant Baptiste, tant qu’il peut jouer avec lui, chez son père. Jusqu’au jour où l’animal « disparait ». Baptiste sait que son hamster est mort, et pourtant, il mène l’enquête avec son père pour le retrouver. L’occasion d’enfin lier des liens familiaux, qui mèneront Baptiste à découvrir le secret se cachant derrière l’existence et la disparition de Bubulle. Une pièce jeune public qui aborde la mort avec une douceur déconcertante. Antonio Carmona a réussi à retranscrire l’importance de la stabilité de la structure familiale par des métaphores légères, qui ne prennent sens qu’après les avoir digéré. Les non-dits, par volonté de protéger l’enfant, deviennent des vérités secrètes, où seuls l’humour et l’amour permettront de les dépasser, et d’enfin les avouer.

Christophe Raynaud de Lage

Samedi 23 mars à 14h. Conservatoire régional du Grand Nancy. 1h. Dès 8 ans. Réservez vos places.

Jeune mort, de Guillaume Cayet

« Comme s’il y avait de la beauté et de la poésie à se faire chier dessus toute sa vie« 

Sous le marronnier de la cour, l’impression d’une nuit d’été, quelque part n’importe où temps que c’est nulle part. On imagine un arrêt de bus, des gosses en vélo qui rôdent et se racontent pêle-mêle légendes et rumeurs. En fait, comme on a un casque sur les oreilles, on imagine ce qu’on veut. L’ouïe est un sens de rêve. Opération murmure pour Guillaume Cayet qui explore encore une nouvelle forme d’écriture et de déploiement des imaginaires autour du son, après Grès, Tentative de sédimentation, présenté lors de la dernière édition de Micropolis. Cette fois-ci, on a un peu l’impression d’assister à l’enregistrement d’un livre audio. Mais rapidement, les mots prennent du relief. Comme avec ses travaux Quartiers Libres, l’auteur prête sa plume pour donner de la force à d’autres voix que la sienne. Ici, celle d’un nazillon bien naze, qui excite en lui la flamme de la haine, lorsqu’un centre d’accueil de réfugiés est installé dans l’ancienne colonie de vacances. Pour ne rien arranger, sa femme est embauchée dans ce centre. La petite flamme de la haine devient alors un brasier au contact de Frédo, facho plus aguerri avec qui il va se lier et consumer. Ce quelque part n’importe où temps que c’est nulle part est aujourd’hui un peu partout. Jeune mort sonne comme une alerte, composée avec Karam Al Zouhir, et le créateur sonore Antoine Briot.

Christophe Raynaud de Lage

Vendredi 22 mars à 19h15, samedi 23 à 17h30 et dimanche 24 à 14h30. Conservatoire régional du Grand Nancy, le 22 et 23, puis Théâtre de la Manufacture – Grande salle, le 24. 55min. Dès 16 ans. Réservez vos places.

La saga de Molière, de Johana Giacardi

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Agnès Melon

Samedi 23 mars à 14h15 et 20h et dimanche 24 à 16h. Gymnase Jacques Jeanblanc, 8 Rue Michel Ney. 1h35. Dès 10 ans. Réservez vos places.

Puis, les dernières propositions, qu’on a malheureusement pas eu l’occasion de voir durant Micropolis.

Transfiguration, de Olivier de Sagazan

DR

Samedi 23 mars à 19h et 22h. Théâtre de la Manufacture – La Fabrique. 50min. Dès 16 ans. Réservez vos places.

Le pain de la bouche, de Morgane Deman

Spectacle à retrouver du 4 au 8 juin 2024 durant Démostratif, festival des arts scéniques émergents à Strasbourg.

Lou Rousseau Fuchs

Samedi 23 mars à 16h et dimanche 24 à 13h30. Pôle Herbert Simon, le 23, puis Théâtre de la Manufacture – La Fabrique, le 24. 50min. Dès 12 ans. Réservez vos places.

Cabaret à la nation, de Alexis Barbier

DR

Quartiers Libres #3, #5 et #6, de Guillaume Cayet

DR

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Au fil des jours, nos ressentis s’ajouteront sur chaque proposition. D’ici-là, rendez-vous à Micropolis, venez aux spectacles et partagez-nous vos avis.

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Josh / Arth